Recherches sur la Motivation

LA MOTIVATION :

ELEMENT ESSENTIEL DE PROGRES

 

  

La motivation est une chose à laquelle tout homme s’est vu confronté au moins une fois dans sa vie en tentant, parfois en vain, d’y échapper. Le problème, pourtant, reste simple : comment bien faire quelque chose, ou simplement le faire, lorsqu’on n’a pas l’envie ? soit donc, comment se motiver ?

L’enseignant ne fait, bien évidemment, pas exception ; Au contraire, sa difficulté est double, car, non seulement il doit se motiver lui-même, mais il doit en plus motiver ses élèves, et ce d’une manière plus fréquente : Comment donner à ces enfants le désir d’apprendre quand ils n’en ont pas l’envie ? Toutefois, la simplicité du problème ne supprime pas la complexité du phénomène. En effet, bien que la solution soit facile à énoncer : Il faut les intéresser ! attirer leur attention ! les mécanismes de « mise en route » n’en reste pas moins d’une extrême complexité et surtout d’une grande fragilité : Un rien suffit pour nous démotiver.

Ainsi, au cours de cette étude, nous allons essayer, autant qu’il se peut, de répondre à ces questions. Mais avant cela, il est nécessaire de comprendre ce qu’on entend par « motivation ».

 

Les caractéristiques de la motivation

Ce problème de la motivation remonte, comme on pourrait dire, à la nuit des temps. Dès l’Antiquité, en effet, les sages puis les philosophes grecs se sont penchés sur la question de la motivation comme un élément déterminant le comportement humain. Deux théories principalement ressortent de leurs recherches : l’intérêt personnel, la re-cherche du plaisir et la fuite de la douleur, d’une part ; et la raison d’autre part. Celle-ci s’explique dans le sens que l’homme cherche ce qu’il juge être bon pour lui (Socrate), qu’il manifeste une quête permanente du bonheur (Platon). Aristote, dans son éthique, remarque que l’homme a des buts, des finalités qui déterminent son comportement. Il observe aussi que, selon le contexte situationnel, ces finalités peuvent varier : certaines sont temporaires, d’autres inaccessibles, d’autres encore répétitives… ; Ainsi le bonheur pour l’homme malade est la bonne santé, pour le pauvre, la richesse, pour le stratège, la victoire…

            A ce stade, on observe que pour atteindre ce qu’il croit être le bonheur, l’homme va mettre en place toute une série d’actions qui vont lui permettre de s’approcher de son but. Ainsi on pourrait dire que ce qu’Aristote appelle « finalité » n’est autre que ce qui motive l’homme.

Toutes les recherches qui ont été faites depuis se réfèrent plus ou moins aux même théories, à savoir que l’homme est motivé soit par la joie, la satisfaction, le plaisir ou au contraire par la peur, la souffrance que lui procure son acte ; soit par un raisonnement réfléchit du bon et du mauvais qu’apporte tout acte.

 

Au milieu de toutes ces théories qui souvent s’opposent les unes aux autres, il est possible de faire ressortir certains points communs, ou complémentaires, de faits concrets. Ainsi, on s’aperçoit qu’en l’homme il y a diverses sources de motivations qu’on pourrait classifier en motivations internes (ou intrinsèques), et en motivations externes (ou extrinsèques, instrumentales). En effet, pour certains chercheurs, l’homme trouve sa motivation en lui-même, par le plaisir (ou la douleur) qu’il obtiendrait en réalisant tel acte (John Locke, Thomas Hobbes, Kant etc.). D’autres prétendent que seul un but à atteindre est source de motivation pour l’homme (Crozier). D’autres, encore, admettent que ces deux sources, intérieure et extérieure, peuvent motiver l’homme avec la même intensité (Abraham Maslow, White, Harter, de Charmes etc.).

Nous remarquons aussi que certaines motivations peuvent être de natures différentes : certaines sont positives, et d’autres négatives. De fait, lorsqu’un acte est motivé par la peur de la douleur, du châtiment (suite à une menace, par exemple), par l’obligation ou le devoir … l’individu n’est pas autodéterminé et sa motivation interne est relativement faible. Du reste, on constate assez souvent que le résultat est plutôt médiocre. D’un autre côté, si un même acte est motivé par le plaisir (qu’on aura ou qu’on reçoit en le faisant), par la satisfaction d’avoir fait ce qu’il faut, par la joie … non seulement le résultat sera d’une bonne qualité (autant que possible), mais encore l’exécution de la tâche sera plus rapide qu’en temps ordinaire.

D’un autre côté, Vallerand et Thill dans leur Introduction à la psychologie de la motivation définissent cette dernière comme un concept présentant

 

« un construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement ».[1]

 

Ainsi, à la motivation ils adjoignent quatre composants : le déclenchement (la mise en route d’un ou plusieurs actes), la direction (canalisant l’énergie et favorisant la sélection), l’intensité (qui mesure l’énergie à mettre) et la persistance (pour poursuivre l’activité malgré les obstacles) ; Eléments nécessaires dans la mise en place de l’activité d’une personne pour l’exécution d’une tâche. Toutefois, il ne faut pas oublier que souvent, dans la réalité, ces caractéristiques dépendent l’une de l’autre et peuvent même s’opposent entre elles.

De son côté, De La Garanderie souligne qu’il n’y a de motivation que si la personne qui agit est consciente des motifs pour lesquels elle fait tel acte et qu’elle adhère à ces motifs[2]. Ainsi, une personne qui agit par obligation (par exemple, un enfant qui prend des cours de français parce que ses parents l’y obligent), n’adhérant pas au motif (ici, l’obligation), aura peu de goût à apprendre et fera preuve d’une faible intensité dans son apprentissage. On peut donc préciser qu’une motivation de nature négative n’est en fait pas optimisée et le résultat s’en fait ressentir. Toutefois, on dit paradoxalement que la peur motive. Or il est difficile de dire  que monsieur Tout le monde adhère sans réticence à ce motif.

 

Ainsi, pour résumé, nous pouvons dire que la motivation se distingue en motivation interne et motivation externe du point de vue de la source ; que chacune d’elles a une nature positive, une autre négative (celle-ci pouvant être démotivante) ; et qu’elles se caractérisent par les composants de déclenchement, de direction, d’intensité et de persistance ; la nature négative de la motivation jouant un rôle surtout sur ces deux dernières.

 

Démotivation et amotivation

Nous avons souligné dans les lignes précédentes qu’une personne peut se voir démotivé pour une raison ou pour une autre, ce qui aura une influence sur l’intensité avec laquelle elle agit ou sur sa persévérance. Mais il y a aussi des cas où l’homme ne voit aucun lien entre ce qu’il fait et le résultat. C’est ce qui arrive lorsque nous faisons une tâche de façons mécanique ; on est alors « amotivés » c’est à dire qu’il y a absence totale de motivation. Une question nous vient alors à l’esprit : l’enfant qui ne veut pas apprendre parce qu’il est obligé est-il amotivé ? Non ! parce que l’enfant, même obligé, apprend toujours quelque chose, ne serait-ce que pour les examens, et qu’il est impossible d’apprendre mécaniquement. Cependant, l’amotivation présentant l’absence de choix et de contrôle, une personne amotivée se sentira désabusée, incapable d’arriver à ses buts et finira par abandonner ses efforts. Il faut donc pour cela avoir la conscience d’être libre de choisir. C’est pourquoi un étudiant qui a choisi librement d’étudier, serait amotivé s’il en venait à se demander pourquoi il continue de fréquenter l’université. Cependant, il faut ajouter que les personnes amotivées peuvent à la longue sombrer dans un état de résignation acquise.

Il est donc rare de voir chez les jeunes enfants une amotivation pure. Souvent ils sont démotivés ou désintéressés. En effet, outre une motivation externe à savoir un but à atteindre (être pilote de ligne, par exemple) ce qui n’est pas le commun des enfants, c’est souvent une motivation interne qui pousse les élèves à étudier, or, cette motivation est fort peu répandue. Ceci est dû à certains éléments ou circonstances tendant à réduire cette motivation, ainsi que l’autodétermination, que certains chercheurs ont regroupé en deux catégories :

- Les facteurs extérieurs ou contextuels (limites de temps, compétition…) ;

             - les comportements interpersonnels (récompenses, menaces…).

Paradoxalement, certaines études ont prétendu que les récompenses jouaient un rôle négatif sur la motivation interne. D’autres, observant les effets des menaces, ont conclut qu’elles étaient d’une grande motivation. Par contre, une limite de temps la diminuerait, tout comme l’évaluation qui bloque les élèves au moment des examens. Toutefois, ces résultats ne sont pas exhaustifs ; En effet, la récompense chez certaines personnes peut être un facteur positif. Par ailleurs, dans la menace il y a absence de la liberté de choix, et donc pas d’adhérence au motif ; certes, le résultat pourra être remarquable, mais l’individu n’en ressortira pas grandit, au contraire.

Il faut souligner, aussi, que, selon certains, le milieu compétitif dans lequel nous nous trouvons et qui s’allie la récompense abaisse le niveau des motivations internes  des individus puisqu’une telle situation peut dominer le sentiment d’autodétermination, et ainsi, un échec peut être perçu comme une incompétence[3]. Cependant, là aussi, si l’individu base ses valeurs sur le principe de « l’esprit sportif », il peut voir l’échec comme une bonne expérience de laquelle il va apprendre, n’abîmant en rien sa motivation de réussite.

 

Eléments motivants

On dit souvent qu’avant de soigner, il faut connaître le mal, alors seulement on peut être efficace. C’est pourquoi, il nous a paru préférable de définir ce qui peut démotiver avant de voir les éléments qui motivent.

Dans ce domaine, tous les événements qui encouragent l’autonomie sont considérés comme des facteurs contribuant à l’augmentation de la motivation interne étant donné que tous ces évènements donnent la possibilité aux gens de se sentir libres et autonomes. Des études ont montré, aussi, que la formulation d’objectifs favorise cette augmentation : objectifs à long terme liés à un but lointain (notre futur pilote de ligne) ; et objectifs à court terme liés à une récompense plus immédiate. De plus le processus de socialisation comme l’interaction directe avec l’environnement et indirecte à travers l’observation des actions d’autrui et de leurs conséquences. Ajoutons, un élément essentiel surtout dans la persévérance à certains objectifs à long terme, le talent que l’on peut qualifier de facilité à réaliser quelque chose ; Ainsi, un enfant qui apprend facilement les mécanismes d’une langue et leur utilisation en contexte sera davantage motivé pour perfectionner cette langue ou en apprendre une autre.

 

La motivation dans l’enseignement

Nous avons fait remarquer au début que, chez un professeur, la motivation était explicitement double : autre chose se motiver, autre chose motiver quelqu’un, à l’occurrence de jeunes élèves. Le cadre scolaire doit pouvoir développer chez l’enfant une motivation intrinsèque. On remarque, ainsi, que la motivation interne de l’enfant est liée à des éléments extérieurs. Certes, le type d’école (ouverte ou traditionnelle) joue un rôle important, ainsi que le programme d’études : fixe et identique pour tous les élèves (dit « contrôlant ») ; ou « à la carte » selon leurs besoins, leurs intérêts (appelé « informationnel »). La structure de la classe montre, elle aussi, des variations dans la motivation des élèves : si elle est compétitive, elle motive plus d’une manière externe qu’interne faisant alors apparaître l’échec comme une catastrophe ; si elle est individuelle, c’est chacun pour soi, l’enfant doit élever lui-même son autodétermination voyant sa motivation extrinsèque s’affaiblir ; dans une organisation de coopération, un équilibre entre les deux motivations est créé : chaque élève s’autodétermine par interaction avec les autres  visant la réussite scolaire en se concentrant sur leur activité même.

Toutefois, le rôle du professeur est sans conteste le plus important. Etant en contact continuel avec les élèves, celui-ci exerce une influence considérable sur leur motivation. D’autant plus que cette influence, d’après certaines études, s’exerce principalement au cours des deux premiers mois de l’année scolaire, et qu’alors, la motivation des apprenants demeure relativement stable pour le reste de l’année. De même, le jugement que porte l’enfant sur son professeur peut modifier sa propre motivation interne. Bien évidemment, comme pour l’école, un professeur strict et sévère, imposant à ses élèves sa manière d’apprendre (en demandant du « par cœur », par exemple), les motive bien moins qu’un enseignant qui encourage leur autonomie, leur créativité, leur réflexion.

 

Conclusion

Ainsi donc, la motivation est quelque chose d’essentiel durant l’apprentissage de l’enfant. Le cadre scolaire y joue un rôle important tant sur le plan des matières à apprendre que sur le plan de la persévérance. Et dans ce cadre l’enseignant est un facteur primordial. En effet, étant seul face aux élèves au moment du cours, il est libre d’utiliser le style d’enseignement qu’il veut, quel que soit le type d’école ou de programme dans lequel il se trouve. Aussi, s’il veut motiver ses élèves il doit, pour le mieux, favoriser l’autonomie, la créativité et la réflexion de chacun d’eux, au-delà du fait qu’il a une certaine quantité de choses à transmettre souvent imposées par les dirigents d’un état.

  

 

Notes

[1] VALLERAND-THILL, Introduction à la psychologie de la motivation, Vigot (1993), p. 18 [retour]

[2] A. De La GARANDERIE, La motivation, Boyard (1991), p. 13 [retour]

[3] VALLERAND-THILL, op. cité, p.265. [retour]

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Ø     VALLERAND-THILL, Introduction à la psychologie de la motivation, éd. Vigot, 1993 ;

 Ø     De La GARANDERIE, La motivation, éd. Boyard, 1991 ;

 Ø     ARISTOTE, L’Ethique, éd. Folio, 1990 ;

 Ø     M. BLEUSTEIN-BLANCHET, Les études de motivation, éd. Hermann, 1961.

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Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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